L’intrépide navigatrice
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Antonette Wemyss-Gorman a été élevée par sa mère, célibataire, dans une famille modeste. Elle est aujourd’hui Commandante de la Garde côtière jamaïcaine. C’est la première femme à occuper cette fonction prestigieuse non seulement dans cet État insulaire, mais également dans toute la région des Caraïbes. La Commandante Wemyss-Gorman a appris très tôt dans la vie à ne jamais accepter un « non » comme réponse. Son maître-mot : « Je peux le faire ! »
« Mes grands-parents et ma mère m’ont convaincue que je pourrais être ce que je voulais. J’ai grandi avec le sentiment d’être le centre du monde, du fait de cette influence. On m’a appris à penser que je pouvais faire tout ce que je voulais faire, et j’ai gardé cette conviction en grandissant », dit-elle.
La Commandante Wemyss-Gorman explique que son enfance passée dans la paroisse rurale de Manchester, en Jamaïque, ne favorisait guère les relations avec l’armée. Alors qu’elle avait emménagé dans la capitale, Kingston, pour y entreprendre des études de premier cycle sur le campus de Mona de l’Université des Antilles, une rencontre fortuite avec un officier à la retraite l’encouragea à poser sa candidature pour un poste d’officier. « Une fois que j’en ai eu l’idée, j’y ai réfléchi et j’ai lu des documents sur la Force de défense de la Jamaïque, et j’ai su que c’était ce que je voulais faire. J’allais le faire, il n’était pas question d’essuyer un échec, c’était écrit. » Cette année-là, sur 34 candidats, Mme Wemyss-Gorman fut l’une des deux seules personnes à réussir l’examen de sélection de la Défense jamaïcaine.
Lorsqu’elle suivit sa formation de base, l’équipage des Garde-côtes ne comptait aucune autre femme. « Au début, j’ai rencontré une certaine résistance, [on me disait] une femme ne peut pas prendre la mer, tu ne peux pas travailler sur un bateau. Mais avec le recul, non, je ne pense pas vraiment avoir pris cela pour un obstacle difficile à surmonter, mais simplement pour un défi à relever. Que voulez-vous dire, je ne peux pas être Garde-côte ? Pourquoi pas ? »
« Lorsque je me suis engagée, j’ai réalisé que toutes les femmes officières jouaient un rôle de soutien, que leurs fonctions étaient essentiellement administratives, alors que ce qui m’attirait dans la Défense, c’était l’idée d’être dehors. L’idée que je me faisais de l’armée, ce n’était pas de travailler derrière un bureau. Alors, quand j’ai réalisé que les femmes ne jouaient qu’un rôle de soutien, ça m’a en quelque sorte poussée à dire non, je ne veux pas faire ça. Si je deviens militaire, je serai soldate, je ferai ce que font les mecs. Je devais aussi avoir une certaine affinité pour l’eau. J’étais convaincue que servir dans la Garde côtière était une excellente idée. »
Une expérience vécue au cours de sa première année en fonction précipita sa progression vers le service en mer. Elle avait été détachée comme signaleur, et elle s’apprêtait à monter à bord d’un avion qui devait la conduire à destination, où elle allait rejoindre un peloton de réserve : « J’ai donc rejoint l’avion avec mon arme et ma radio, et on m’a dit que non, je devais donner l’arme et la radio à un homme. Ça m’a vraiment offusquée ! J’ai répondu que j’étais le signaleur. J’ai dit : c’est une énorme radio nommée Manpack, elle est tellement grande que vous pouvez à peine me voir. Ça fait des semaines que je me balade avec cette radio, et on me demande maintenant de la donner à un soldat de sexe masculin... j’ai dit non, j’y vais. Nous avons donc été postés. »
Conscients de sa passion et de son enthousiasme, les militaires lui permirent d’intégrer l’École navale, et elle s’inscrivit au Britannia Royal Naval College, au Royaume-Uni. Une fois sa formation terminée, elle rejoignit la Garde côtière de la Jamaïque, où elle fut la première femme officière du pays à prendre la mer. En 2002, elle fut nommée Commandante du garde-côte Belmont Point et devint ainsi la première femme capitaine de vaisseau des Caraïbes.
Elle constate que son ascension jusqu’au plus haut rang ne s’est pas faite automatiquement, mais n’a été possible que grâce à « des commandants très modernes » qui lui ont permis d’avancer. « Comme c’était nouveau et personne ne l’avait fait auparavant, j’étais constamment bien consciente du fait que je devais exceller dans mon travail. »
Elle a ainsi acquis une excellente réputation, et d’autres femmes ont suivi son exemple et se sont enrôlées dans la Garde côtière. Celle-ci compte actuellement la plus grande proportion de femmes officiers de l’armée (un quart des effectifs). La Commandante Wemyss-Gorman est fière de pouvoir affirmer qu’au fil du temps, la Défense jamaïcaine a placé des femmes à des postes non traditionnels, et que leur nombre a augmenté.
C’est au peuple jamaïcain qu’elle a rendu les plus grands services, dit-elle. Elle donne le conseil suivant à la jeune génération : « Si vous croyez en vos capacités, si vous vous fixez des objectifs, et si vous travaillez dur, vous pouvez faire tout ce que vous voulez faire. J’ai grandi dans la campagne jamaïcaine. Fille d’une mère célibataire, j’ai été élevée en compagnie de mes grands-parents dans une humble demeure campagnarde, et 22 ans plus tard, me voilà à la tête de la Garde côtière. »